Balado de Services financiers Innovation CIBC

Il faut dire « oui, et... », plutôt que « oui, mais... »

Episode Summary

Expensify PDG David Barrett, un chef de la direction, reconnaît qu’il n’a jamais prévu de se lancer dans la gestion des dépenses. Mais en acceptant les occasions, il a fait d’Expensify une entreprise novatrice prospère.

Episode Notes

Dire « Oui, et… »  

Quand Expensify CEO David Barrett pitched his big idea, it was flatly rejected. Mais lorsque les investisseurs et les clients potentiels lui ont dit qu’une idée qu’il était prêt à abandonner était géniale, il n’a pas riposté. Maintenant, la société de gestion des dépenses est l’un des acteurs les plus prospères de l’économie de l’innovation au monde, et tout cela parce que David Barrett a su dire « oui, et ».

S’installer

David Barrett a choisi de s’installer à plus de 1 000 kilomètres de la Silicon Valley et à un million de milles de son modèle d’affaires. On lui a conseillé de présenter son application à des entreprises du classement Fortune 500, mais il a plutôt choisi des PME, et n’a pas dépensé un sou pour acquérir ses clients. « Ce qui nous distingue vraiment, à long terme, c’est notre façon d’acquérir des clients, et d’une manière qui réduit nettement le coût de vente... Ça se fait naturellement », explique-t-il.

En faisant passer les bénéfices avant la croissance, on a les deux

On recommande à la plupart des entreprises en démarrage de l’économie de l’innovation de mettre l’accent sur la croissance plutôt que sur les bénéfices. Mais l’entreprise de David Barrett a été rentable presque dès le premier jour. « Nous sommes maîtres de notre destinée », souligne-t-il. « Cela signifie que nous pouvons embaucher qui nous voulons. Nous pouvons croître comme nous le voulons. Par conséquent, je pense que nous avons beaucoup plus de contrôle et un intérêt beaucoup plus grand que jamais à l’égard du risque. » Cette rentabilité a donné à la société établie à Portland une longueur d’avance sur les sociétés de capital de risque qui cherchent à prendre le contrôle du conseil d’administration.

Joignez-vous à David Barrett alors que nous explorons les chambres fortes de son siège social centenaire avec notre série #ÉconomieInnovationCIBC, puis écoutez-le offrir ses conseils à contre-courant lors du balado Services financiers Innovation CIBC.

Services financiers Innovation CIBC est un partenaire financier de confiance pour les entrepreneurs et les investisseurs. Communiquez avec les membres de notre équipe à l’adresse cibc.com/servicesfinanciersinnovation

Episode Transcription

Michael Hainsworth :

Cet épisode a été enregistré à l’été 2019. Depuis, Expensify a lancé sa carte d’entreprise, qui fait aussi don d’une partie des frais d’interchange à des organismes de bienfaisance, a lancé un assistant virtuel pour les voyageurs d’affaires qui tient compte de la COVID-19 et a élargi ses partenariats partout dans le monde. Voici comment la société en est arrivée là aujourd’hui.

Présentateur :

Aujourd’hui, dans le balado de Services financiers Innovation CIBC : l’application de gestion des dépenses Expensify n’a jamais été une jeune pousse comme les autres dans l’économie de l’innovation, car son dirigeant, David Barrett, privilégiant les bénéfices au lieu de la croissance, a réalisé les deux sans même devoir céder le contrôle de l’entreprise qu’il a fondée.

David Barrett :

Au fond, ce qui distingue Expensify n’est pas seulement ses fonctionnalités, etc. Tout cela sera inévitablement copié. Ce qui nous distingue vraiment, à long terme, c’est notre façon d’acquérir des clients, et d’une manière qui réduit nettement le coût de vente, en fait sans coût de vente, car nous ne dépensons rien pour l’acquisition de clients. Ça se fait naturellement, et nous avons ainsi pu atteindre certains segments de marché inaccessibles aux autres.

Présentateur :

Dans cet épisode du balado de Services financiers Innovation CIBC, nous révolutionnons le modèle d’affaires de la Silicon Valley. Voici votre hôte, Michael Hainsworth.

Michael Hainsworth :

David Barrett est un dirigeant pas comme les autres. Alors que les jeunes pousses abondent dans la Silicon Valley, il a démarré la sienne à plus de 1 000 km de là, à Portland, en Oregon. Alors que les administrateurs lui conseillaient de cibler les sociétés du Fortune 500 comme clientèle, il a préféré cibler les PME. Alors que les sociétés de capital de risque n’avaient d’yeux que pour la croissance, ce sont plutôt les bénéfices qu’il avait l’œil. Notre conversation s’ouvre sur le fait que sa première intention n’avait rien à voir du tout avec le secteur de la gestion des dépenses.

Michael Hainsworth :

Revenons donc à 2008. Vous avez qualifié la tâche de traitement des reçus de très ennuyeuse et fastidieuse, alors pourquoi diable avoir plongé dans cet abysse?

David Barrett :

Vous allez rire. En fait, c’était un accident. Ma dernière entreprise en démarrage a été acquise. J’habitais à San Francisco, dans le quartier du Tenderloin, et je voulais bâtir une plateforme pour aider à distribuer de l’argent aux sans-abri en toute sécurité, sans qu’ils puissent acheter de l’alcool ou des drogues. San Francisco offre d’excellentes installations, mais seulement si vous vous présentez sobre. J’ai commencé à bâtir une plateforme autour des cartes de débit prépayées. Essentiellement je donnais une carte de débit aux sans-abri et les achats étaient portés à ma carte de crédit. Je voulais simplement donner aux gens et les aider.

David Barrett :

Je suis allé présenter mon idée à des banques. Elles m’ont dit : « Quoi? Non, nous n’allons pas vous aider à créer cette plateforme étrange pour abandonner de l’argent. » Je me suis alors dit : « Très bien, je dois éliminer les risques de ma présentation. Je dois avoir l’air ennuyeux. » Je me suis ensuite demandé : « Quelle est l’utilisation la plus ennuyeuse possible de ces cartes? Des relevés de frais! » C’est ainsi que j’ai commencé. Je leur ai ensuite dit : « Ouais, oubliez tout cela. Ce sera une carte que les propriétaires d’entreprise donneront à leurs employés. Ils peuvent préciser des limites de dépenses, puis chaque achat effectué par l’employé est porté aux cartes de crédit du propriétaire de l’entreprise pour qu’il puisse accumuler des milles. »

David Barrett :

C’est exactement la même technologie, mais présentée d’une façon que les banques pourraient comprendre. Elles ont répondu : « Ça semble sûr et ennuyeux. Je déteste les relevés de frais, moi aussi. » Je disais toujours « oui » à tout. Si les banques me disaient : « Ça semble bien. Puis-je exporter les données vers mes logiciels comptables? » Je répondais : « Oui, bien sûr. »

David Barrett :

« Puis-je numériser les reçus? »

David Barrett :

« Oui, bien sûr. » Je disais « oui » à tout. Les gens semblaient vraiment aimer ce système de relevés de frais. Je me suis dit que c’est ce que je devrais faire. C’est ainsi que j’ai commencé.

Michael Hainsworth :

C’est rigolo. Vous avez dit quelque chose m’interpelle vraiment en tant que personne qui s’est elle-même aventurée dans le domaine de l’entrepreneuriat. Une grande partie de ma réussite est attribuable au fait de dire « oui » à tout. C’est exactement ce que vous avez fait.

David Barrett :

Tout à fait d’accord. Il y a toute une attitude de collaboration. Il faut dire « oui, et », plutôt que « oui, mais ». Je pense que souvent, on se laisse obnubiler par les experts. On veut toujours embaucher un expert. On ne veut pas réinventer la roue. Mais si vous ne pouvez pas inventer une roue, pourquoi pensez-vous que vous pourriez inventer quelque chose de mieux?

David Barrett :

Je pense que le problème avec les experts, c’est qu’ils ne peuvent être que des experts du passé. Personne n’est un expert de l’avenir. Si vous voulez être en mesure de planifier pour l’avenir, vous devez simplement être à l’aise avec l’apprentissage et les erreurs. Je pense qu’il suffit d’aller de l’avant et de se concentrer sur l’avenir sans vraiment attendre d’obtenir une autorisation ou de demander les meilleures pratiques. Il suffit de tracer son propre chemin et de régler les problèmes au fur et à mesure.

Michael Hainsworth :

L’une des choses les plus intéressantes que j’ai apprises sur le monde de l’entrepreneuriat, c’est que le mot « erreur » n’est pas mauvais en soi.

David Barrett :

Tout à fait. En fait, je parlais à une collègue aujourd’hui. Elle m’a demandé : « Cette chose en particulier n’a pas fonctionné comme nous le pensions. Considérons-nous cela comme un échec? » Et c’est intéressant pour moi. Je ne pense pas aux échecs. Imaginez que vous escaladez une montagne, ou quelque chose comme cela, et que vous grimpez, que vous bougez, que vous trouvez un chemin différent, que vous explorez et que vous finissez par trouver une façon d’atteindre le sommet. Y a-t-il eu une étape en particulier qui a été un échec?

David Barrett :

Les chemins ne menaient peut-être pas tous exactement là où nous voulions qu’ils aillent, mais dans l’ensemble, tout s’est bien passé. Ce concept d’erreurs et d’échecs ne semble pas vraiment logique. Si, dans l’ensemble, vous allez toujours vers l’avant, ce ne sont que des leçons apprises.

Michael Hainsworth :

Nous avons de jeunes pousses, des entreprises en croissance et des entreprises en fin de croissance. Comme vous avez fondé votre entreprise en 2008, vous avez largement dépassé l’étape du démarrage. Selon vous, quelle est la différence entre la phase de démarrage et la phase de croissance?

David Barrett :

Tout d’abord, je conteste ce cadre, car cela laisse entendre que les étapes de vie d’une entreprise en démarrage ne sont qu’une question d’âge. Je pense que c’est davantage une question d’attitude. Pensez-vous que vos meilleurs jours sont devant vous ou derrière vous? Je pense que nos meilleurs jours sont certainement devant nous. Je pense que nous sommes aussi novateurs ou axés sur le démarrage qu’avant.

David Barrett :

Certainement, dans la Silicon Valley, je pense qu’il y a une sorte de croyance selon lequel une entreprise démarre, les choses sont géniales : deux jeunes dans un garage. Mais ensuite, vous embauchez des personnes plus âgées qui ont de l’expérience. Bien sûr, il y a de la croissance, mais le rythme ralentit. Ce n’est pas aussi amusant. Vous mettez en place un conseil d’administration. Les membres du conseil prennent ensuite une série de décisions ennuyeuses. L’entreprise croît, mais toutes les innovations cessent et tous vos meilleurs employés vous quittent. Il y a cette notion d’entropie pour les entreprises en démarrage. Vous commencez de façon très dynamique et tout finit par être vraiment ennuyeux.

David Barrett :

Je ne suis vraiment pas d’accord. Je dirais que cela ne se produit que si vous ne faites rien pour l’éviter. Le bénéfice brut n’est pas la même chose que le bénéfice net. Expensify est vraiment rentable. Nous encaissons des profits tous les mois. Par conséquent, nous ne sommes pas vraiment tenus de suivre les règles de Silicon Valley, où il faut constamment aller chercher des fonds et dépenser de l’argent. Nous sommes maîtres de notre destinée. Cela signifie que nous pouvons embaucher qui nous voulons. Nous pouvons croître comme nous le voulons. Par conséquent, je pense que nous avons beaucoup plus de contrôle et un intérêt beaucoup plus grand que jamais à l’égard du risque. Du point de vue de l’étape de démarrage, que ce soit pour la tolérance au risque ou l’enthousiasme pour l’avenir, c’est le moment idéal pour travailler pour l’entreprise.

Michael Hainsworth :

Oui, mais combien d’entreprises en démarrage connaissez-vous qui sont rentables? Je ne peux pas imaginer qu’il y a beaucoup de jeunes dans un garage qui vous regardent et considèrent que vous êtes à la même étape qu’eux.

David Barrett :

Je suis d’accord, ce n’est probablement pas le cas, mais cela ne veut pas dire que cela ne devrait pas l’être. Des gens pensent que les entreprises en démarrage ne peuvent pas être rentables, et imaginent que le profit est un obstacle à la croissance. De quoi parlez-vous? Les plus grandes entreprises du monde sont aussi les plus rentables. Je pense que les gens choisissent les mauvaises entreprises comme modèles. Bien sûr, si votre modèle est une entreprise en démarrage qui ne fait que perdre de l’argent, il va sans dire que vous allez en perdre aussi. Mais j’ai toujours été inspiré par les vraies entreprises qui existent depuis longtemps et qui seront là pour toujours.

Michael Hainsworth :

Vous n’avez pas attaqué les gros joueurs à vos débuts. Les investisseurs en capital de risque pourraient dire : « Vous auriez dû frapper aux portes des entreprises Fortune 500. » Parlez-moi de la stratégie entrepreneuriale qui consiste à trouver une croissance importante en aidant les petites entreprises.

David Barrett :

En fait, comme la plupart des choses, je ne dirais pas qu’il y a beaucoup de prévisions de génie. Il s’agit simplement de prêter attention à ce qui fonctionne, même si personne ne pense que c’est possible. Quand nous avons commencé, nous offrions nos services aux petits joueurs, parce que c’est tout ce que nous connaissions. Mais comme nous étions en quelque sorte la norme dans la Silicon Valley, certains de nos petits joueurs ont grandi très rapidement. Nous avons toujours eu comme politique de ne pas aller vers qui que ce soit parce que nous ne faisons pas de marketing. Nous ne faisons pas d’appels sortants. C’est 100 % d’appels entrants. Nous acceptions seulement ceux qui venaient à nous. Certaines de ces entreprises ont simplement pris beaucoup d’expansion. Par conséquent, nous avons fini par créer un produit d’entreprise. Nous pouvons soutenir à peu près n’importe qui dans la liste Fortune 500 si nous le voulons.

David Barrett :

Nous avions ce produit d’entreprise que nous ne nous attendions pas vraiment à créer. Ces grandes entreprises du palmarès Fortune 500 communiquaient avec nous. Nous nous sommes dit : « Excellent. Nous allons répondre à l’appel. » Le problème, c’est que les entreprises Fortune 500 sont nulles. C’est une tonne de travail pour très peu de revenus, parce que c’est très concurrentiel là-bas. Tout le monde sait comment les trouver, et tout le monde rivalise pour leur offrir des services. Toutes vos marges s’écroulent. Par conséquent, nous nous en sommes rendu compte : « Wow, nous pouvons tout simplement faire beaucoup plus d’argent avec un client dont la taille est deux fois moins importante en dollars absolus. Pourquoi parlerions-nous à ce client plus important pour lequel il y aura tellement de travail à faire et qui aura besoin de beaucoup d’ingénierie et de gestion et de choses comme ça? Je peux simplement obtenir tellement plus de clients et beaucoup plus de liquidités brutes avec une marge beaucoup plus élevée en optant pour un client de taille moyenne. »

David Barrett :

Je dirais qu’en fait, un modèle axé sur le marché intermédiaire et les PME est vraiment notre point idéal, car c’est là que les modèles d’affaires classiques échouent. Je dirais qu’au fond, ce qui distingue Expensify n’est pas seulement ses fonctionnalités, etc. Tout cela sera inévitablement copié. Ce qui nous distingue vraiment, à long terme, c’est notre façon d’acquérir des clients, et d’une manière qui réduit nettement le coût de vente, en fait sans coût de vente, car nous ne dépensons rien pour l’acquisition de clients. Ça se fait naturellement,

David Barrett :

Nous avons ainsi pu atteindre certains segments de marché inaccessibles aux autres. Je pense que j’ai peut-être une opinion différente du marché. Nous avons environ 80 000 clients. Supposons que la somme de toute la concurrence combinée compte peut-être 80 000 autres clients. Arrondissons un peu. Disons qu’il y a peut-être 200 000 entreprises dans le monde entier qui utilisent une forme de gestion des dépenses. Mais il y a 20 millions d’entreprises rien qu’aux États-Unis. Je pense que chacune de ces entreprises a des problèmes de dépenses, parce que toutes les entreprises ont des dépenses, mais elles n’ont pas toutes des revenus. La plupart d’entre elles n’ont pas de profit, mais elles ont toutes des dépenses. Pratiquement toutes les entreprises de la planète ont ce problème dans une infime fraction, et jusqu’à maintenant, tout le secteur de la gestion des dépenses ne fait que voir la pointe de l’iceberg.

David Barrett :

Lorsque nous nous sommes lancés dans ce secteur, nous nous sommes dit : « Pourquoi tout le monde est-il si obnubilé par ces clients incroyablement inhabituels et à faible marge au sommet de l’échelle, alors que 99 % des occasions sont en fait très simples, comportent des exigences de base pouvant être répétées et sont prêts à payer une marge démesurée pour obtenir le service? » Non. Je pense que tout le monde a raté la grande occasion, car ils ont un modèle d’affaires, ou plus important encore, un modèle d’acquisition de clients, qui est axé uniquement sur le palmarès Fortune 500, car ce sont les personnes faciles à trouver. Il faut faire plus de recherches et avoir un modèle d’affaires qui peut atteindre le reste du marché si vous voulez le conquérir.

Michael Hainsworth :

Vous avez dit quelque chose d’intéressant. Vous avez dit qu’au niveau des PME, les modèles d’affaires classiques échouent. Que vouliez-vous dire par cela?

David Barrett :

Je dirais qu’il y a un énorme fossé entre l’acquisition de consommateurs et l’acquisition d’entreprises. En fait, quand je suis arrivé dans ce secteur, je me suis dit : « Oh, je vais m’occuper de la gestion des dépenses. » Tout le monde s’est dit : « Oh, je sais exactement comment votre entreprise va évoluer. Vous allez mettre sur pied une force de vente basée sur les commissions qui va cogner aux portes des entreprises Fortune 500. Ils vont conclure un contrat de trois ans pour d’importantes commissions, et tout cela sera confié à une grande organisation de gestion de produits pour les engagements pluriannuels que vous devrez établir. Bien entendu, une grande équipe de gestion de comptes s’occupera de tout cela et tentera de prendre de l’expansion au fil du temps. Votre modèle d’affaires est entièrement prévisible. »

David Barrett :

Je dirais que pratiquement tous nos concurrents essaient de suivre le même modèle. Par conséquent, ils font tous de la publicité aux mêmes endroits pour les mêmes facteurs économiques. Ils embauchent et s’échangent les mêmes représentants. Tous les aspects de leur entreprise sont identiques, les facteurs économiques, l’ingénierie, la stratégie, etc. Je ne vois pas comment on peut perturber un secteur exactement comme tout le monde.

David Barrett :

Notre approche est très différente. Nous ne faisons pas de publicité. Par conséquent, nous n’avons pas de modèle d’affaires axé sur les représentants. Nous n’avons aucun représentant commercial. Nous ne faisons pas d’appels sortants. Cela signifie que nous n’avons pas de structure de commission. Sans structure de commissions, nous ne concluons pas de contrats pluriannuels. Dans l’ensemble, 90 % de nos revenus sont portés d’un mois à l’autre à une carte de crédit. Par conséquent, nous n’avons pas à conclure de contrat avec les clients et à survendre le produit. Nous créons simplement notre produit, puis les gens l’achètent.

David Barrett :

Cela signifie que les clients que nous avons sont en grande partie en libre-service. En fait, ils n’ont conclu aucun engagement avec nous. Nous créons notre produit et publions des versions au besoin. La structure interne de l’entreprise donc est complètement différente. Par conséquent, notre marge est beaucoup plus élevée que celle de tous les autres. Notre rentabilité est démesurée et notre croissance est plus rapide que celle des concurrents. En plus, nous avons plus de clients qu’eux. Ce n’est possible que parce que notre modèle d’affaires est très différent. S’il était possible de le faire en modifiant seulement quelques-unes des variables de l’un des modèles d’affaires existants, je dirais que l’un ou l’autre de nos concurrents aurait trouvé la bonne solution. Mais non. Nous avons une machine complètement différente qui produit un résultat complètement différent.

Michael Hainsworth :

L’avez-vous fait délibérément? Avez-vous bâti l’entreprise en disant : « J’ai examiné la façon traditionnelle d’établir un modèle d’affaires pour une entreprise. Tous les autres le feront de cette façon. Nous allons procéder autrement. » Ou avez-vous commencé à assembler les pièces au fil du temps, puis pris du recul et réalisé que vous aviez quelque chose d’unique?

David Barrett :

C’est certainement la deuxième option. En rétrospective, il est facile de se dire : « J’ai fait toutes ces recherches, j’ai étudié les choses, j’ai compris l’occasion et je l’ai saisie. » Non. Ça n’a pas fonctionné du tout comme ça. Comme je l’ai mentionné, je n’avais pas l’intention de bâtir cette entreprise.

Michael Hainsworth :

D’accord.

David Barrett :

Je l’ai fait uniquement parce que les gens étaient très enthousiastes. Lors de cette conférence, je ne peux pas vous dire combien de simples inconnus sont venus me serrer dans leurs bras. On me disait à quel point je leur faisais gagner du temps. Je me suis dit « Vraiment? Pourquoi? Dites-moi simplement ce que vous pensez que je fais et pourquoi vous vous en souciez tant. » J’ai parlé à quelques milliers de voyageurs d’affaires. Ils se disent : « Je déteste que toutes les options soient si mauvaises. » Vous vous dites : « Pourquoi détestez-vous cela en particulier? » Je me suis rendu compte que les voyageurs d’affaires éprouvaient beaucoup de difficultés. Je me suis dit : « Je peux résoudre ça, je suppose. Je suis ingénieur. Je pourrais juste construire ça. »

David Barrett :

J’ai ensuite parlé à tous les experts. Ils me disaient : « De quoi parlez-vous? Cela ne fonctionnera jamais. Quand allez-vous embaucher vos équipes de vente pour aller parler aux chefs des services financiers? » J’ai répondu : « Je ne sais pas. Je vais simplement vendre directement aux employés. »

David Barrett :

« Comment cela fonctionne-t-il? Parce que les employés ne choisissent pas leur propre option de gestion des dépenses. » J’ai répondu : « On dirait qu’ils utilisent Excel ou rien du tout. J’ai l’impression qu’ils sont prêts à acheter. » On m’a alors dit : « C’est fou. Les gens vont être congédiés s’ils essaient de faire cela. » J’ai répondu : « Je ne sais pas. Il ne semble pas que les gens soient congédiés. On dirait que ça fonctionne. » Ce n’est qu’après une assez longue période que nous avons réalisé pourquoi cela fonctionnait. Je dirais que la gestion des dépenses est résolument virale, mais seulement à l’intérieur de l’entreprise.

David Barrett :

Chaque fois que vous soumettez un relevé de frais, vous nous mettez en contact avec une personne plus importante que vous, comme votre patron, votre service des finances et ainsi de suite. Avec l’arrivée des boutiques d’applications mobiles, Expensify est une application vraiment gratuite pour les employés. Nous ne payons pas de taxe sur les boutiques d’applications ou quoi que ce soit du genre. Par conséquent, nous avons réussi à convertir, au moyen d’une application gratuite, les boutiques d’applications mobiles en un mécanisme d’acquisition de pistes à coût marginal nul pour les employés, qui alimente une dynamique d’adaptation ascendante incroyablement virale directement pour le chef des services financiers, à grande échelle. Comme dans le cas d’une entreprise en démarrage inhabituelle, nous avons toujours été inondés de pistes dès le premier jour. Par conséquent, notre défi n’est pas au sommet de l’entonnoir. Notre défi est de savoir comment convertir cette vague massive de pistes qui nous parviennent toujours.

David Barrett :

Nous n’avons pas eu les mêmes problèmes que la plupart des entreprises qui ne demandent qu’à être remarquées; le bouche-à-oreille a été très fort dès les premiers jours. Nous avons donc voulu savoir comment convertir et saisir ce que nous avions déjà. Et lorsque l’on parlait aux autres, ils nous disaient : « Ça ne pourra jamais fonctionner. » Ou bien : « OK, c’est mignon. C’est un modèle vraiment mignon que vous avez. Cela représente jusqu’à 100 000 $ par mois, mais pas un million. » Puis, on arrive à un million. « Deux millions, ça ne marchera pas. » Le chiffre d’affaires continue de doubler et vous vous rendez compte de ce qui suit : « Je ne sais pas. On dirait que ça fonctionne pour toujours. »

David Barrett :

Peut-être qu’à un moment donné, les gens devront commencer à écouter les entreprises qui mettent ces choses en pratique et simplement accepter qu’il soit possible que toutes les pratiques exemplaires que nous avons sur la façon de vendre ne soient pas la seule solution. Surtout parce que tout le monde dit : « Les ventes aux entreprises se sont toujours faites comme cela. »

David Barrett :

Non, ce n’est pas le cas. Je veux dire, toute l’idée des produits SaaS ne s’est pas concrétisée avant Salesforce. Lorsque Salesforce est entrée en scène, tout le monde trouvait l’idée ridicule. On disait : « Wow! Comment pourriez-vous vendre de tels produits sans une force de vente établie ou une force de vente régionale? » Je répète sans cesse : « La vente est un domaine très novateur. L’innovation s’étend sur des décennies, pas nécessairement sur des années. » Les gens ont tendance à oublier que ce n’est pas parce que tout se fait d’une façon particulière en ce moment que cela signifie que cela a toujours été fait de cette façon. Et cela ne veut certainement pas dire que ce sera toujours ainsi.

Michael Hainsworth :

D’accord. De toute évidence, vous n’avez pas suivi le cours d’administration des affaires 101. Oublions donc les leçons d’affaires 101. Voyons ce que vous pensez des leçons d’affaires 201. Combien de temps avez-vous passé à bâtir l’entreprise et non à séduire, à vous faire l’ambassadeur de la société pour mobiliser des fonds?

David Barrett :

Pour ce qui est du temps passé à séduire, je dirais que la leçon la plus importante que j’ai tirée se résume à devenir rentable. Tant qu’on n’est pas rentable, on reste à la merci du prochain investisseur, et on ne contrôle pas sa destinée. Dès les premiers jours, quand je me suis assis pour créer Expensify, le but était de bâtir une entreprise apte à devenir extrêmement rentable, car tout ce que je voulais faire nécessitait des tonnes d’argent et une excellente équipe avec qui le dépenser. Trouver du financement était indispensable. Mais maintenant, je consacre tout mon temps à essayer de racheter les actions des investisseurs. Parce que maintenant que l’entreprise est rentable, c’est bien, nous étions là pendant un certain temps, mais cette période est terminée et je ne retournerai jamais en arrière.

Michael Hainsworth :

Dites-m’en plus là-dessus. Vous avez obtenu plus de 26 M$ en financement si les calculs à l’endos de ma serviette sont exacts. Vous êtes un expert en mobilisation de capitaux.

David Barrett :

Ah non, pas du tout, je dois d’abord dire que, selon les normes de la Silicon Valley, ce n’est rien, c’est pitoyable, c’est un chiffre très gênant. Les gens sont stupéfaits du peu de fonds que nous avons réunis. En général, les gens trouvent et dépensent des centaines de millions de dollars pour en arriver là où nous sommes. Nous nous sommes dit : « Non. » Nous finançons la grande majorité de nos activités à même nos bénéfices et avec de l’argent que nous avons effectivement gagné. Ça crée une culture d’entreprise très différente. Lorsqu’il s’agit de mobiliser des fonds, je suis plutôt nul, en fait. Parce que je ne sais pas comment le dépenser, et surtout, je pense que je suis trop honnête sur le fait que je n’en ai pas vraiment besoin.

David Barrett :

J’ai abordé des investisseurs, dans les premiers temps. Je leur disais : « Je veux réunir des fonds, tout va bien se dérouler. » Ils demandaient : « Qu’allez-vous faire de cet argent? » Je leur répondais : « Je ne sais pas, peut-être acheter de la publicité. » Et ils me disaient : « Vous n’avez jamais fait de publicité et vous êtes en plein essor, pourquoi faire de la publicité? » Je me suis dit : « En effet, je vais peut-être le dépenser sur cette autre chose. » Ils m’ont dit : « Mais pourquoi? Les ingénieurs ne coûtent pas si cher. » En fin de compte, je n’arrivais jamais vraiment à convaincre qui que ce soit que j’avais besoin de cet argent. En conséquence, je n’ai pas réuni tant d’argent que ça, et au bout du compte je n’en avais pas vraiment besoin. Et ça me va! Je suis content que nous ayons réuni si peu de fonds. C’est extraordinaire.

Michael Hainsworth :

Alors, pourquoi une facilité de crédit à la Banque CIBC était-elle la suite logique?

David Barrett :

Eh bien, la dette et les capitaux propres sont deux choses très différentes. C’est amusant. Dans la Silicon Valley, les bénéfices sont mal vus. En fait, ils sont presque une hérésie. C’est comme si le profit était considéré comme une occasion ratée. Et quand je parlais aux investisseurs d’essayer de lancer une entreprise rentable, je n’obtenais qu’une totale incompréhension. On me demandait littéralement : « Pourquoi? Pourquoi bâtir une entreprise rentable? » Et on oubliait que le but des affaires n’est pas que de vendre des actions. Le produit que j’essaie de vendre n’est pas Expensify en tant qu’entreprise, mais Expensify en tant que produit destiné aux clients individuels.

David Barrett :

Je pense que nous sommes devenus rentables d’abord parce que je voulais rester maître de ma destinée. Mais maintenant que nous sommes rentables, je réalise que, wow! Les bénéfices permettent le recours à l’effet de levier d’une manière très efficace. La Banque CIBC a été fantastique pour nous. Nous avons discuté avec quelques créanciers, nous nous sommes vraiment bien entendus avec Paul. Il a été tellement flexible concernant les clauses restrictives et les modalités et s’est assuré de comprendre ce que nous voulions réaliser avec l’entreprise et de faire en sorte que les chiffres fonctionnent. Alors, vive le financement par emprunt! Les actions, ça peut aller, mais les emprunts, c’est bien mieux.

Michael Hainsworth :

Vous avez commencé à faire la programmation en première année?

David Barrett :

Oui, oui. J’ai commencé à six ans, vous vous souvenez de RadioShack ou l’on trouvait les ordinateurs Tandy et ainsi de suite.

Michael Hainsworth :

Tout à fait.

David Barrett :

Nous allons au centre commercial, mes parents me laissaient au RadioShack et allaient magasiner. À leur retour, j’avais une petite chauve-souris voletant dans l’écran ou quelque chose comme ça. Alors oui, j’ai commencé à six ans à faire de l’infographie et des jeux vidéo. À l’école primaire, puis au secondaire, j’utilisais des moteurs graphiques 3D. J’ai travaillé au laboratoire de réalité virtuelle de l’Université du Michigan. Ensuite j’ai fait partie de l’industrie du jeu au Texas pendant un temps, j’ai fait de la voix hors champ, de la vidéoconférence, du partage d’écran et enfin, j’ai fait de la distribution du contenu PDP et de solutions. [0 h 24 min 29 s].

David Barrett :

La plupart de mes connaissances relèvent des technologies dures, c’est-à-dire de choses vraiment très complexes. C’est un profil inhabituel pour un magnat des relevés de frais comme moi.

Présentateur :

Apprenez-en davantage sur l’économie de l’innovation, la création d’un produit minimal viable, la préservation de l’esprit d’entreprise malgré la croissance de l’effectif et la mondialisation de votre entreprise. Abonnez-vous aux balados de Services financiers Innovation CIBC animés par Michael Hainsworth sur le site cibc.com/servicesfinanciersinnovation.